• (la suite du chapitre dans pas longtemps...)
    (mise à jour 1, désolé je m'a trompé d'url dans la newslettre...)
    (mise à jour 2. quatre cases de plus. j'ai rien dit pour le soir du 13, mais j'ai pensé aux victimes des attentats. La violence est le refuge de l'incompétence.)
    (mise à jour final, après deux semaines de battement : c'est pas trop tôt!)


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  • J'essaie un nouveau truc : histoire de ne pas vous laisser patienter trop longtemps, je poste ce chapitre en morceaux, au fur et à mesure que je finis la planche. D'ici deux jours vous aurez la deuxième partie. Dites-moi ce que vous pensez du principe...

    Edit final : le triskel signifie que le chapitre est achevé. rendez-vous au prochain.


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  • Je vomis si fort que des larmes jaillissent de mes yeux. Si je ne serrais pas les jambes, je me pisserais dessus.
    Je pensais bien que ce serait difficile à encaisser, mais pas jusqu'à en avoir la nausée.

    J'aurais du voir qu'il me mentait, quand il m'a dit que tout allait bien. Je m'en veux d'avoir nié la gravité de son état.

    Tandis que je me rince la bouche, j'entends du fracas dans la chambre. Je sors précipitamment de la salle de bain, pour trouver Silvère étendu par terre, les yeux révulsés, le corps agité de violentes convulsions.
    Le sol sous sa tête est maculé de sang, il a du s'ouvrir le cuir chevelu en tombant.
    Est-ce la fatigue, le stress, le désespoir, les nausées.... J'observe la scène comme si ce n'était pas réel.

    Ce n'est pas en train d'arriver.
    Je perd le parfait sang-froid dont j'avais fait preuve en découvrant Silvère en train d'asphyxier dans le salon.

    Je me mets à hurler, figée sur place, incapable d'actionner la sonnette d'urgence, ou de courir à la porte chercher du secours.

    Mes hurlements finissent quand-même par alerter le personnel qui envahit la chambre; un infirmier s'agenouille près de Silvère et je l'entend parler de crise d'épilepsie. Une de ses collègues me prend par les épaules, m'enjoignant à quitter la chambre et à me calmer.

    On me ramène à la salle d'attente, que j'ai la sensation de connaître par cœur, pour y avoir déjà passé près d'une journée.
    Au bout de vingt minutes, le neurochirurgien en charge du dossier vient me voir. Je le suis jusqu'à un bureau où il m'annonce que Silvère est toujours inconscient. Il vient d'être transféré au service de neurologie, il est désormais sous monitoring, avec des électrodes collées un peu partout. Ses constantes cérébrales se sont stabilisées, enfin, jusqu'à la prochaine crise.

    Devant mon insistance à rester auprès de mon petit ami, le neurochirurgien m'oppose des raisons techniques et me conseille de rentrer chez moi. Je me sens à la fois coupable et soulagée de quitter le champ de bataille.
    J'ai les yeux qui brûlent, l'estomac en vrac, et ce sera un miracle si je ne m'endors pas au volant.
    Je décide de repasser chez Silvère pour nourrir son chat.
    Quand j'arrive sur place, je constate que le chat s'est nourri tout seul, en fouillant dans le sac de plats à emporter que j'avais rapporté du traiteur Thai. Des débris de plastiques et de bouffe jonchent le parquet. C'est parti pour une séance de nettoyage...
    Ma corvée achevée, je m'effondre sur le canapé, ruinée par la fatigue et l'anxiété. Le téléphone sonne dans la chambre. Je laisse sonner, le répondeur se met en route.

    -Silvère, c'est Françoise. Faut qu'on se voit pour discuter des obsèques de ton père. Il en a plus pour très longtemps, et ya des papiers à signer, des formalités administratives, enfin bref, tu ne pourras pas y couper. Rappelle-moi vite, s'il te plaît.

    Elle risque d'attendre longtemps. Je m'extirpe du canapé pour la rappeler et lui exposer la situation.
    Elle a la voix qui tremblote.
    -Après tout ce que j'ai fait pour eux... Ça fait trente ans que j'assiste à un gâchis monumental sans pouvoir rien y faire... Et maintenant, ils vont mourir chacun de leur côté... Depuis des années que je fais le pont entre eux deux, tout ce que j'ai récolté, c'est des soucis.

    C'est là que je pose la question fatidique :
    -Pourquoi Silvère est-il convaincu que son père ne l'aime pas?
    Elle soupire et commence à s'épancher.
    -Henri et moi, on est des enfants de la DDASS. Nos parents étaient alcooliques, et on devait se planquer pour pas prendre une trempe quand ils avaient un coup dans le nez. Henri ramassait plus que moi, parce qu'il était plus vieux et qu'il se défendait... On a été placé dans un foyer, jusqu'à ce qu'on soit en âge de bosser. Henri s'est promis de ne jamais avoir d'enfant. Et ma belle-sœur le savait! Quand il a appris qu'elle était enceinte, il était furieux.... Mais Solène le voulait, ce bébé. Comme j'avais déjà deux enfants à l'époque, j'ai tenté de convaincre Henri que c'était une bonne chose, que ça allait bien se passer... Solène et moi on pensait qu'il finirait par s'adoucir... Mais il n'a même jamais voulu prendre le petit dans ses bras, ni à la maternité, ni après.

    Comment une femme a-t-elle pu tomber amoureuse d'un type aussi sinistre, jusqu'à vouloir des enfants avec lui?
    -Ils auraient mieux fait de se séparer, dis-je à Françoise.
    -Vous savez, à l'époque, c'était pas simple d'être mère célibataire. Et divorcer, c'était encore mal vu. Mais c'est vrai que ça aurait mieux valu pour tout le monde. Silvère ne pouvait compter que sur sa mère et quand elle est morte dans cet accident, il a tout perdu. Le pire, c'est qu'on aurait peut-être pu la sauver si elle n'avait pas...

    Françoise étouffe un sanglot. Puis reprend, la voix chevrottante :
    -Solène était à nouveau enceinte, d'environ quatre mois. Elle n'avait rien dit à personne, c'est les urgentistes qui l'ont découvert. L'accident de voiture a provoqué une fausse-couche, qui a provoqué une hémorragie, qui l'a tuée. On l'a caché à Silvère, c'était déjà assez dur pour lui ce jour-là...

    Une violente nausée me saisi à la gorge. Une envie de vomir des mots.
    -Mais vous vous rendez compte, m'écrié-je, qu'il se croit encore responsable de la mort de sa mère?? Vous auriez pu lui épargner des années de culpabilité, si vous lui aviez dit la vérité!!

    La tantine se rebiffe.
    -J'ai fait tout ce que je pouvais pour lui! C'est facile de refaire le monde avec des "si", mais j'avais pas que Silvère à gérer, j'avais aussi ma propre famille!
    -Et sous prétexte de ménager votre petit confort personnel, rétorqué-je, vous avez laissé votre neveu se dépatouiller tout seul avec ses angoisses et un père qui l'a élevé comme un chien! Bel esprit de famille!
    -Ça suffit, crie-t-elle dans le combiné, je ne vous permets pas de me juger!!!
     

    Elle me raccroche au nez. Je me dis que j'ai été méchante et injuste, et à la fois, pas tant que ça.


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