• Il n’y avait eu qu’un seul mort depuis le jour de la fondation de la « ville ».
    Mais l’un des survivants semblait prompt à rejoindre la Hordes, tant il peinait à rentrer, le soir venu.
    Au point que c’était devenu LA bonne blague du moment.
    Au coucher du soleil, il y avait toujours quelqu’un pour dire :

    "-Qui va chercher Alexis ce soir ? "
    ça en faisait ricaner quelques-uns, d’autres grinçaient des dents, d’autres encore s’en foutait totalement.

    N’empêche qu’il y avait toujours une bonne âme pour aller chercher le clampin égaré pour la énième fois à deux kilomètres de la ville. D’ici quelques semaines, ça ne fera sans doute plus rire personne. Et sans nulle doute également, Alexis finira dehors aux pied des remparts, ses cris d’horreur noyés par le vacarme des Hordes venues chercher pitance.

    Riff se reposait dans sa cabane de tôle et de carton, le chat ronronnant sur son estomac plat.
    Toujours pas de nourriture aujourd’hui pour les ouvriers. Seuls les expéditionnaires ont le droit de manger, pour aller plus loin, creuser plus longtemps dans le désert.

    Ile songe à nouveau à l’abri sur le plateau rocheux, au vieux fou qui habitait là. Ile se rappelle ce fameux soir… Il n’y avait plus rien à manger depuis trois jours, et le vieux fou devenait de plus en plus délirant, marmonnant et s’agitant vainement, jusqu’à ce que la folie prenne le dessus… Après, tout s’était passé très vite.

    Riff qui somnole devant le feu. Un choc sur la tête, le voile noir, les membres gourds, perte des sensations, du sens de l’orientation. Plus d’oxygène, une corde qui serre autour du cou. Le corps en hyschémie, les bras qui se crispent et râclent le sol, à la recherche de quelque chose à quoi se retenir. Les doigts qui rencontrent un objet dur. La main qui se referme dessus, et frappe à l’aveuglette. Cri sourd du vieil homme, qui lâche prise. L’oxygène qui s’engouffre à nouveau dans les poumons, le corps qui revient à la vie. Riff arrache le sac qu’ile a sur la tête, et fait face à son adversaire. Dans ses mains, l’objet qu’ile n’a pas lâché, en guise d’arme. C’est une pelle de chantier rouillée. Le vieux qui repart à l’assaut, Riff qui frappe de toutes ses forces avec l’extrémité du manche. Le vieux porte ses mains à sa bouche en sang. Un autre coup fait rouler sa tête trois mètres plus loin. Le corps agité de soubresaut, de gros bouillons de sang qui s’écoulent sur le sol.

    Riff s’allume une cigarette. Les volutes de fumées qui s’éparpillent dans la pénombre de sa cabane, comme des anges de miséricorde.
    Ile a toujours un peu plus faim qu’avant, depuis ce jour.

    Le vieux fou voulait le dévorer, mais c’est lui qui a finit sur le barbecue.



    (j'en profite pour préciser que je suis actuellement en vacances, je reviens le 9 septembre, vous tiendrez bien jusque là? t'façon vous n'avez pas le choix!)

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  • -Hé, "Blair Witch"!! Magne-toi avec la scie!! Faut quand-même pas trois heures pour couper une planche!

    Riff suspend son geste, fixe Cactusdrummer, au fond des yeux. Son interlocuteur soutient son regard quelques secondes avant de se détourner. Il donne un coup de pied dans un carton vide, et s'assoit dans un coin en attendant la scie.
    "Blair Witch". On lui avait encore jamais faite, celle-là.

    Une planche de plus. Riff la dépose dans sur le tas et quitte la manufacture d'un pas nonchalant, sa pelle sur l'épaule.

    Chaleur écrasante. Aujourd'hui, rationnement d'eau. Bouche sèche, légère migraine, les yeux qui brûle. Heureusement personne n'a envie de lui faire la causette, ça ellui fera économiser sa salive.

    Il semble y avoir deux factions cohabitantes dans cette ville. Deux groupes distincts, arrivés là par hasard, et pour le moment cela fonctionne bien.
    Mais Riff avait un mauvais pressentiment. Ile avait déjà connu cette situation. Tout le monde se comporte bien pendant une semaine. Les gens font connaissance, comparent leurs façons de faire, font des concessions. Arrivé au septième jour, curieusement, les personnalités se révèlent sous un jour nouveau, et l'on a de moins en moins envie d'en savoir sur leur compte. Le moindre prétexte devient l'étincelle qui met le feu au poudre, et c'est la guerre. Engueulade, vol, sabotage, lynchage, bannissement, pendaison... Parfois c'est la fin d'une ville, une des factions quittant le terrain, à moins que tout le monde ne périsse dans la nuit, victime de la bêtise réciproque des uns et des autres...

    Dans la banque, la nourriture était rare, et le jardin potager était peu fructueux. Il y avait déjà eu quelques discussions à ce sujet dans la journée. Même si les chantiers de défense étaient plus que suffisant, on ne pourrait pas continuer longtemps comme ça, sans rien à manger.
    Les marchemorts finiraient par venir assez nombreux pour renverser les défenses... Poussés par leur odorat surdéveloppé, comme disait le vieux fou dans son abri solitaire... 

    À
    quoi bon vivre en communauté, en fait, si justement cette vie en groupe vous rend plus repérable et donc plus vulnérable de jour en jour?
    Pour une illusion de sécurité, une illusion de confort, une illusion de fraternité?
    Pour une illusion d'humanité?


    17 commentaires


  • Fouiller une maison abandonnée apporte son lot de surprises.
    Outre les petites joies en dénichant une scie, de la nourriture, de l'eau, on a aussi parfois/souvent la visite de quelques/nombreux marchemorts, prêt à vous sauter sur le râble.

    Riff avançait avec précaution. Malaise. L'impression d'être observé. Mais aucun marchemort en vue, ni leur odeur.
    Quelque chose a bougé, là, dans le coin, ile en est sûr. Donnant un petit coup de pelle dans un tas d'ordures...

    MEEEEEEEAAAAAAAOOOW!!...

    La petite créature a le poil aussi hérissé qu'ellui en cet instant. Grondant et feulant, toutes griffes dehors. Deux taches d'or verdâtre surmontant une rangée de petites dents aiguës.

    Passé l'instant d'adrénaline pure, Riff se ravise.
    S'ile fait un pas, le chat va déguerpir. Bouger très lentement, de façon imperceptible, pour ne pas l'effrayer.
    Le fixer dans les yeux, capter son regard, et lui inspirer confiance. Plisser et cligner des yeux, jusqu'à ce que, peut-être, le chat en fasse autant, par mimétisme. Alors, il se laissera approcher.
    Quittant sa pose défensive, l'animal s'assoit. Il est efflanqué, dieu seul sait depuis combien de temps il survit dans ces ruines.

    Riff s'accroupit et sort de sa poche un reste de sandwich moisi. Ile en émiette un coin, tout en chuchottant. Le chat tend le cou, humant l'odeur de nourriture. Au bout d'un moment, n'y tenant plus, il se lève, et vient mendier pitance en miaulant d'une voix rauque.

    Au soir, Riff rentra en ville avec le chat sur l'épaule. Aioren bougonna en voyant passer l'épouvantail à tête jaune :
    "-On se croirait à Salem ma parole..."

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